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Dossier 617 millions $ de dommages à payer à Dig Oil : Tshisekedi obligé de négocier

Des patates chaudes. C’est ce que le régime Kabila aura légué à celui de Félix Tshisekedi. Outre le très complexe dossier du port en eaux profondes de Banana pour lequel les négociations se poursuivent avec Dubaï Ports World, mieux connue sous le sigle de « DP World », la présidence de la République doit gérer le dossier tout aussi complexe de Dig Oil, une société sud-africaine qui réclame 617 millions $ à la République Démocratique du Congo pour non exécution des contrats liés à l’attribution des blocs pétroliers.

Le 7 novembre 2018, la Chambre de commerce internationale (ICC) basée à Paris avait condamné la RDC à payer 617 millions $ à Dig Oil pour avoir octroyé en 2010 le bloc 1 du lac Albert à la société Caprikat/Foxwhelp. Alors qu’elle avait signé un contrat pour le même permis en 2008 avec Dig Oil. La RDC a été également condamnée pour défaut d’ordonnance présidentielle devant couvrir les permis sur les blocs 8, 22 et 23 de la cuvette centrale alors qu’un contrat avait été signé en 2007 sur ces zones par Dig Oil avec le ministre des hydrocarbures de l’époque, Lambert Mende. Une ordonnance présidentielle a finalement été signée par Joseph Kabila quelques jours avant l’élection présidentielle du 30 décembre 2018, mais celle-ci est intervenue après que ICC avait rendu son jugement.

Ces maladresses du gouvernement congolais de l’époque doivent donc être gérées par le nouveau pouvoir pour éviter que le pays ne soit contraint d’exécuter le jugement rendu par ICC. 617 millions $, ce n’est pas une petite somme par les temps qui courent. C’est plus ou moins 10% du budget annuel du pays. C’est ainsi que Félix Tshisekedi a mis en branle ses équipes pour trouver un arrangement avec Dig Oil.

Des sources signalent que les négociations sont depuis peu menées du côté congolais par l’ambassadeur itinérant du chef de l’Etat, Nicolas Kazadi. But de l’opération : trouver un compromis acceptable au différend. La délégation congolaise comprenant entre autres des experts de la présidence de la République et du ministère de la justice devaient rencontrer celle de Dig Oil cette semaine à Paris.

Un recouvrement difficile

Bien que disposant d’un jugement qui lui accorde 617 millions $, Dig Oil est consciente qu’elle aura du mal à recouvrer ladite somme. Aussi, est-elle disposée à trouver un accord de compensation en nature. Selon des sources, la société sud-africaine exige la prise du bloc 1 proche du lac Albert, qui est encore pour au moins un an dans les mains de Caprikat et Foxwhelp du milliardaire Dan Gertler. Dig Oil voudrait en outre obtenir des blocs à l’embouchure du fleuve Congo, là où Perenco produit plus ou moins 25 000 barils de pétrole par jour.

La situation inconfortable de la RDC dans ce dossier est en partie due à l’indolence dont a fait montre le gouvernement sous le régime Kabila. Le pays a en effet laissé prospérer l’arbitrage à Paris sans trop s’en préoccuper, prenant carrément à la légère le processus. Selon « Africa Intelligence », les avocats de Dig Oil, Bernard Remiche et Vincent Cassiers du cabinet belge Sybarius, aidés par Kerman & Co à Londres, ont facilement déjoué la défense de la RDC prise en charge par l’ex-directeur adjoint de cabinet du ministre de la justice André Kalenga-Ka-Ngoyi ainsi que par l’avocat congolais Valence Bolebe Ekosso Gombe.

Se sentant fortement secouée, la RDC a bien tenté de se rattraper en octroyant des blocs de la Cuvette centrale à Dig Oil après le jugement de Paris en 2018. Cette manœuvre avait pour objectif d’arrêter les poursuites. Malheureusement, la décision favorable à ICC est désormais sans appel et Dig Oil a bien l’intention de négocier les avantages maximums en échange d’un abandon, au moins partiel, du recouvrement des 617 millions $ que devrait lui payer la RDC.

Lire aussi : La RDC doit 619 millions de dollars USD à une entreprise sud-africaine

Des arguments pour rebondir

Pour sa part, l’Etat congolais se démène pour faire annuler l’arbitrage d’ICC. Consulté par le ministère de la justice, le président du tribunal de commerce de Kinshasa, M. Jean-Marie Kambuma Nsula, a fait savoir aux autorités congolaises que le pays devrait refuser d’exécuter le jugement d’ICC, dans la mesure où elle serait « contraire à l’ordre public congolais ».

Le magistrat se fonde sur le fait qu’au cours des réunions de conciliation tenues les 09 et 17 décembre 2010, le ministère des hydrocarbures et Dig Oil avaient convenu que le bonus de signature payé par Dig Oil sur le bloc 1 (finalement attribué à Caprikat et Foxwhelp) couvrirait le bonus des blocs de la Cuvette 8, 22 et 23. Cet accord rendrait, selon le magistrat, caduque toute poursuite liée au bloc 1. Or, cette compensation de bonus entre blocs a été officiellement acceptée par la RDC le 11 août 2011. Pourtant, en 2016, Dig Oil a engagé l’arbitrage, notamment sur le bloc 1.

La partie s’annonce dure pour les deux parties. La présidence de la République doit batailler ferme avec Dig Oil pour trouver un modus vivendi qui préserve les intérêts du pays, gravement menacés à cause des combines du régime précédent.

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