Dans son message à la nation mardi 24 mars dernier, le président de la République a décrété, l’état d’urgence sur l’ensemble du territoire afin de permettre notamment la prise de mesures d’isolement de Kinshasa, épicentre du coronavirus jusque-là en RDC, du reste du pays. Dans la foulée, une ordonnance présidentielle a suivi pour formaliser la démarche du chef de l’Etat.
Tout ne s’arrête pourtant pas à cette seule ordonnance. Le président de la République devrait, en principe, saisir le bureau de l’assemblée nationale et du sénat aux fins de la convocation du congrès.
Malgré les réticences observées chez certains parlementaires, nombre d’entre eux exigent la tenue du congrès en vue de se conformer aux dispositions constitutionnelles. Pourtant, de nombreuses voix se sont élevées pour demander que le parlement se réunisse en congrès dans un format réduit pour éviter tout risque de contamination à grande échelle des parlementaires par le covid 19. On rappelle que le congrès compte 609 membres soit 500 députés et 109 sénateurs.
S’il est possible de décréter un huis-clos sur la séance qui pourrait être convoquée pour éviter une trop grande concentration de personnes dans la salle de congrès du palais du peuple en éparpillant également les congressistes dans cette vaste salle, le risque n’en est toutefois pas écarté. Bien plus, les congressistes n’auront, en cette matière, pas donné le bon exemple à la population qui respecte la mesure d’interdiction de tout rassemblement ou réunion de plus de vingt personnes.
Il y a quelques jours pourtant, l’honorable Christophe Lutundula estimait, sur les ondes de la radio Top Congo, que le parlement pouvait se réunir en format réduit, en faisant appel aux présidents des groupes parlementaires et des groupes politique, rappelant à ce sujet l’exemple de la France où le parlement s’était réuni en petit comité pour adopter la loi formalisant l’état d’urgence.

La polémique enfle
Si le congrès est appelé à se réunir, nombreux se posent la question de savoir ce qu’il fera concrètement. Certes, la constitution (article 119, point 2) et le règlement intérieur du congrès (article 3, point 3) font de l’autorisation de proclamation de l’état d’urgence une matière relevant du congrès, on note que l’autorisation interviendra bien après la proclamation de l’état d’urgence, même si on rappelle que le président de la République s’était, comme l’exige la même constitution en son article 85, concerté avec les présidents de l’assemblée nationale et du sénat avant de décréter l’état d’urgence. Il s’agira vraisemblablement d’un exercice visant à formaliser la décision prise par le président de la République, dans la mesure où l’état d’urgence (article 144 alinéa 4 de la constitution) a une durée de 30 jours et ne peut être prorogé que sur autorisation de l’assemblée nationale et du sénat pour des périodes successives de 15 jours.
Pour certains parlementaires, il ne s’agira pas seulement d’autoriser la proclamation de l’état d’urgence, mais le parlement devra également adopter une loi spécifique dans la mesure où la constitution stipule en son article 85 dernier alinéa que « les modalités d’application de l’état d’urgence et de l’état de siège sont déterminées par la loi ». Il en découle, selon eux, que le gouvernement devra présenter au parlement un projet de loi en ce sens.
Des spécialistes en la matière se posent toutefois des questions sur l’organe devant examiner un tel projet de loi. Est- ce le congrès ou les deux chambres du parlement réunis séparément ? On fait savoir en effet que le congrès n’a dans sa compétence que l’adoption d’une seule loi, la loi constitutionnelle. Tous ses autres actes sont matérialisés par des résolutions (article 6, alinéa 2 du règlement intérieur du congrès), qui stipule : « L’Assemblée plénière statue par voie de loi constitutionnelle ou de résolution, selon le cas. »
Ne pas oublier l’article 61
En attendant que les uns et les autres se mettent d’accord sur des questions apparemment de procédure, il faut noter que l’ordonnance du président de la République portant proclamation de l’état d’urgence doit être soumise à la cour constitutionnelle. L’article 145 dernier alinéa de la constitution stipule en effet : « Ces ordonnances sont, dès leur signature, soumises à la Cour constitutionnelle qui, toutes affaires cessantes, déclare si elles dérogent ou non à la présente Constitution ».
Même si la constitution ne précise pas les conséquences de l’arrêt de la cour en cette matière, on doit rappeler que l’article 61 de la constitution énumère un certain nombre de libertés qui ne peuvent être restreintes même en cas d’état d’urgence. Cet article stipule en effet : « En aucun cas, et même lorsque l’état de siège ou l’état d’urgence aura été proclamé conformément aux articles 85 et 86 de la présente Constitution, il ne peut être dérogé aux droits et principes fondamentaux énumérés ci-après : 1. le droit à la vie ; 2. l’interdiction de la torture et des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ; 3. l’interdiction de l’esclavage et de la servitude ; 4. le principe de la légalité des infractions et des peines ; 5. les droits de la défense et le droit de recours ; 6. l’interdiction de l’emprisonnement pour dettes ; 7. la liberté de pensée, de conscience et de religion. »
Mona Kumbu
La polémique est intéressante et révélatrice, et j’attendais la chute !!! Quelle chute ? Que le Gouvernement et les parlementaires arrêtent le palabre et s’occupent plutôt d’adopter et mettre en oeuvre des mesures socio-économique de sauvegarde de la Nation.