Ce jeudi 1er mai 2025, Martin Fayulu a pris tout le monde de court. Aux côtés de l’ancien président Joseph Kabila, mais aussi de Delly Sesanga et Moïse Katumbi, il a signé une déclaration commune appelant à un dialogue national inclusif pour trouver des solutions à la crise sécuritaire qui sévit actuellement dans la partie Est de la République démocratique du Congo.
Cette image d’unité entre Martin Fayulu et Joseph Kabila a de quoi désorienter plus d’un observateur. Il y a encore peu, Fayulu n’hésitait pas à qualifier Kabila d’« agent envoyé pour balkaniser le Congo ». En 2019, il l’accusait frontalement d’avoir volé « la victoire du peuple ». Pour lui, Félix Tshisekedi n’était rien d’autre qu’une « marionnette » entre les mains de Kabila, véritable maître du pouvoir.
Et pourtant, quelques années plus tard, les voilà désormais réunis dans un front commun. Ce rapprochement politique avait déjà commencé à se dessiner fin 2024, lorsque plusieurs figures de l’opposition, dont Fayulu, Katumbi et Kabila, s’étaient opposées ensemble à toute tentative de révision constitutionnelle visant à offrir un troisième mandat à l’actuel président Félix Tshisekedi.
Ce revirement spectaculaire interroge. D’autant plus que Joseph Kabila, désormais sénateur à vie, est dans la ligne de mire de la justice congolaise. Une procédure visant à lever son immunité est en cours. Il est soupçonné de crimes graves, y compris des crimes de guerre et un soutien présumé au groupe rebelle M23. De quoi nourrir les spéculations sur les véritables motivations de ce front politique.
Fayulu, lui, semble avoir rangé ses griefs au placard, misant sur une convergence des intérêts pour affaiblir le pouvoir en place. Mais à quel prix ? Son revirement soulève des questions sur la constance des convictions politiques en RDC. Où finit le principe, où commence la stratégie ?
Fayulu est-il en train de trahir ses valeurs ou simplement d’adapter sa lutte aux réalités du moment ? Peut-on encore accorder du crédit aux alliances politiques dans un pays où elles semblent se faire et se défaire au gré des menaces, des ambitions et des opportunités ?
Élie Ngandu