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Pont Kinshasa – Brazzaville : la « fatwa » des notables Ne Kongo

Le pont Matadi (anciennement pont Maréchal) sur le fleuve Congo reliant par la route Matadi à Boma est situé à une cinquantaine de kilomètres vers l’aval du fleuve (Photo FBF)

Lorsque le représentant de la Banque Africaine de Développement (BAD) annonçait, à l’issue de son audience avec Denis Sassou Nguesso, le président de la République du Congo, la décision de son institution de concrétiser le projet de relier Kinshasa et Brazzaville par un pont, il ne mesurait sûrement pas les conséquences. Car, depuis son annonce, on note une levée de boucliers dans les rangs des notables de la province du Kongo central. 

Si les projections de la BAD sont respectées, Kinshasa et Brazzaville, les deux capitales les proches du monde, vont davantage se rapprocher avec l’érection d’un pont route-rails sur le fleuve Congo. Les travaux de la construction dudit pont devraient démarrer au mois d’août 2020. « Les études de faisabilités sont terminées », a affirmé le représentant de la BAD, avant d’indiquer que « cet ouvrage coûtera 660 millions USD et l’argent viendra de la plateforme d’investissement Africa 60 et de la BAD ».

Deux jours après l’annonce de la BAD, la première réaction venait des notables de la province du Kongo central.  Pourquoi les ressortissants du Kongo central s’opposent-ils à ce projet qui date de plusieurs années ? «  Ce projet est suicidaire pour les installations portuaires de cette province et la survie économique même du Kongo-Central et de la RDC », a tranché Venant Wabelo, porte-parole des notables Ne Kongo, intervenant le mercredi 15 mai  sur Radio Okapi.

Construire d’abord le port de Banana

« Les gens qui ne veulent pas de notre République créent des situations pour nous affaiblir. Mais, le gouvernement central qui accepte cette situation puise les fonds pour son fonctionnement où ? N’est-ce pas au Kongo-Central ? Où est-ce qu’on a mis le projet de construction du port en eaux profondes à Banana ?», s’interrogent les notables Ne Kongo par le biais de leur porte-parole.

Au lieu de penser à la construction du pont sur le fleuve Congo pour relier Kinshasa à Brazzaville, les Ne Kongo invitent les autorités congolaises à concrétiser préalablement le projet de construction du port de Banana. Pour ce faire, ils sollicitent la sagesse du chef de l’Etat congolais, Félix-Antoine Tshisekedi. Dans le cas contraire, menacent-ils, « plusieurs actions seront menées pour contrer l’exécution de ce projet ».

Pour montrer qu’ils sont contre ce projet, plusieurs habitants de la Cité côtière de Muanda au Kongo-Central, sont descendus dans la rue, samedi 18 mai. Pendant la marche, les manifestants réclamaient la construction du port en eaux profondes à Banana et s’opposaient au projet de construction du pont route-rails reliant Kinshasa et Brazzaville. La marche a été organisée sous l’initiative des organisations de la société civile et des partis politiques locaux.

Conséquences économiques

Ce n’est pas la première fois que les notables du Kongo central s’opposent à cette initiative. Ils s‘étaient déjà opposés à la construction du pont Kinshasa – Brazzaville sous le règne du maréchal Mobutu. Hier comme aujourd’hui, ils mettent sur la table des arguments d’ordre économique. « Matadi, c’est le port ». Cette phrase résume en elle seule l’importance du port de Matadi pour la population vivant au chef-lieu de la province du Kongo central. Bien plus, la province du Kongo Central tire ses principales ressources financières des taxes et impôts perçus au port de Matadi. Certains notables Kongo affirment même que « le port de Matadi est pour les ressortissants du Kongo central ce que la Gécamines est pour les Katangais et la Miba pour les Kasaïens ».

A ce sujet, Nelson Tamba,  Secrétaire rapporteur de la Coordination de la Société civile de Muanda estime que si le projet du pont Kinshasa – Brazzaville est concrétisé, « toutes les sociétés qui dépendent de la situation maritime risquent de fermer ». «Nous allons gonfler les effectifs des chômeurs. Imaginez alors quel serait l’impact du Pont Maréchal. Que deviendront les hôteliers de Boma, Muanda et Matadi? Que deviendront l’Office congolais de contrôle (OCC), la Société nationale d’assurances, la Ddga, les Lignes maritimes congolaises ? » s’est interrogé Nelson Tamba.

Malgré la ferme détermination de la BAD de concrétiser la construction du pont Kinshasa – Brazzaville, un projet vieux de plus de deux décennies, les autorités congolaises sont, elles, invitées à tenir compte de la position des notables Ne Kongo. Ces derniers avaient déjà « imposé » leur « veto » sous les régimes Mobutu et Kabila père et fils. Au moment où le projet prend de l’épaisseur, certains notables prononcent leur « fatwa » pour que ce pont ne voit jamais le jour. 

RKM

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