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FCC – CACH devant un feu rouge

Félix Tshisekedi et Joseph Kabila lors de la passation de pouvoir (Photo RFI)

Hormis la question de la formation attendue du gouvernement et l’invalidation par la cour constitutionnelle de plusieurs députés Lamuka au profit de bonzes du FCC, la semaine aurait pu se terminer dans le calme.

Il a fallu une séance plénière vendredi 07 juin à l’assemblée nationale pour que tout s’emballe. Une séance qui devait plutôt être tranquille puisque l’ordre du jour ne portait que sur une communication du bureau en rapport avec la constitution des commissions permanentes de la chambre basse. Tout allait se terminer quand le député Léon Mondole demande la parole par motion. La présidente parle d’une « motion d’information », mais Léon Mondole affirme qu’il s’agit d’une « motion incidentielle ». Pourquoi incidentielle puisqu’aucune question polémique n’est prévue à l’ordre du jour?
Malgré cette entorse au règlement intérieur, Léon Mondole se lance dans un discours fleuve sous forme d’un réquisitoire à charge des institutions du pays dont particulièrement le président de la République. Il fustige l’inertie des institutions et en vient à évoquer les ordonnances présidentielles nommant des mandataires des entreprises publiques Générale des carrières et des mines (Gécamines) et Société nationale des chemins de fer du Congo (SNCC).
Pour lui, ces ordonnances sont inconstitutionnelles puisque le gouvernement n’a jamais siégé pour valider les personnes proposées et le premier ministre ne les a pas contresignées, Bruno Tshibala étant démissionnaire et Ilunga Ilunkamba n’étant pas encore en fonction. Il propose que l’assemblée nationale adopte des recommandations pour que le président de la République rapporte ses ordonnances. Il s’en suit un débat houleux, passionnel. Des mots durs, proches de l’irrévérence sont employés. Certains députés, majoritairement du FCC, soutiennent la démarche de Léon Mondole, d’autres rappellent opportunément que l’assemblée nationale ne pouvait débattre des actes administratifs du président de la République, ce dernier étant politiquement irresponsable devant le parlement.
Malgré ce rappel à l’ordre notamment du député Lamuka Christophe Lutundula, les députés FCC se montrent intraitables. Ils veulent apparemment en profiter pour régler des comptes au Cap pour le changement, (CACH) du président Félix Tshisekedi, pourtant leur allié dans la coalition devant diriger le pays. Un timide recadrage de la présidente n’arrête pas les députés FCC dont un, Charles Nawej, se montre particulièrement offensif, estimant que le président aurait signé « inconsciemment » les ordonnances querellées.
Même si la présidente Jeanine Mabunda insiste sur la nécessité de préserver le principe de la liberté d’engager des débats démocratiques à l’assemblée nationale, laissant entendre que le débat en cours ne s’attaquait nullement au président de la République, le mal est fait. Certes, elle n’a pas mis la fameuse motion incidentielle aux voix et a levé la séance après avoir fait la synthèse du débat, il y a tout de même lieu de se poser des questions sur la motivation réelle de ce spectacle offert aux Congolais par les députés nationaux. Certains ont même recommandé aux ministres du portefeuille, des mines et des transports de ne pas notifier les mandataires nommés à la Gécamines et à la SNCC.
Quoi qu’on dise, le débat de vendredi met sur la place publique les dissensions réelles dans la coalition FCC-CACH. Tout porte à croire qu’au-delà d’une question de forme, sur le caractère irrégulier ou inconstitutionnel des ordonnances contestées, le FCC semble n’avoir pas apprécié que le patriarche Gabriel Kyungu, très proche de Moïse Katumbi, mais aussi soutien depuis quelques mois des actions de Félix Tshisekedi, soit nommé président du conseil d’administration de la SNCC. Pour eux, cet acte est considéré comme une prime aux invectives du président de l’Unafec dont on connaît l’opposition à l’ancien président Joseph Kabila, autorité morale du FCC.
Les députés FCC ont également, à travers ce débat qui frise l’outrage au chef de l’Etat, voulu faire passer un message sur le désaccord persistant sur la formation du gouvernement. L’un d’eux a même laissé entendre que c’est le partenaire CACH qui bloquerait la machine, en se montrant trop gourmand dans ses revendications sur la répartition des postes au sein du gouvernement en gestation.
Les invectives, les propos déplacés et les attaques en règle entendus vendredi et les déclarations tardives et sous forme de menaces des députés CACH, prouvent à suffisance que le deal Joseph Kabila – Félix Tshisekedi est fragile. Si personne n’en connaît les termes ni les tenants et aboutissants, il est tout de même invraisemblable que des députés s’attaquent ainsi publiquement à l’homme qui incarne la nation. Déjà, certains n’hésitent pas à mettre cette attitude sur le compte d’une sorte d’avertissement à Félix Tshisekedi. Si le président peut dissoudre l’assemblée nationale en cas de crise persistante entre elle et le gouvernement (article 148 de la constitution), le FCC lui rappelle qu’il dispose d’une majorité pouvant le mettre en accusation devant la cour constitutionnelle pour haute trahison (articles 164 à 167 de la constitution).
On est là dans un scénario funeste, avec suspens garanti que même Alfred Hitchcock nous envierait la trame. Tout peut arriver, à tout moment, le bien comme le pire. Si les seuls protagonistes du deal savent jusqu’où ils ne peuvent aller, leurs affidés feraient œuvre utile à ne pas entrer dans une cuisine dont ils ne maîtrisent pas le fonctionnement du matériel sous peine de provoquer un incendie. Reste à savoir si les deux signataires du deal jouent franc jeu et respectent, sans piétiner les intérêts de la nation, les engagements pris. Ce n’est pas évident.
N’tombo Lukuti

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