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Kamerhe, Mukuna, Bamaros, Wenga… la justice à plein régime

« Invitation », « réquisition d’information », « mandat de comparution », « mandat d’amener », « mandat d’arrêt provisoire ». On ne parle que de ça depuis plus de deux mois. A la faveur de l’enquête sur les détournements présumés dans le cadre de l’exécution du programme des cents jours du président de la République, les Congolais apprennent chaque jour à se familiariser avec ces termes.

Le 8 avril dernier, c’est le plus gros des poissons, directeur de cabinet du chef de l’Etat et pas que ça, son allié politique en puissance, qui tombait comme un fruit bien mûr.

Après près de 7 heures d’audition au parquet général près la cour d’appel de Kinshasa/Matete, Vital Kamerhe était conduit à la prison de Makala. A deux reprises, le tribunal de paix puis le tribunal de grande instance de Kinshasa/Gombe ont rejeté sa demande de mise en liberté provisoire. C’est donc en prévenu arborant l’uniforme des détenus de la prison de Makala qu’il a comparu pour la première fois lundi 11 mai dernier.

Mercredi 13 mai, les magistrats ont remis ça. Pascal Mukuna, pasteur de l’église ACK, dirigeant de l’équipe de football Fc Renaissance et dirigeant du mouvement « Eveil patriotique » a été mis en détention après 6 heures d’audition au parquet général près la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe. Il est encore gardé au cachot, la confrontation entre lui et sa présumée victime, Mamie Tshibola, qui l’accuse de « viol, rétention des documents et menaces de mort » devant se poursuivre sans doute aujourd’hui.
L’évêque Pascal Mukuna, qui venait lui-même de porter plainte contre l’ancien président Joseph Kabila, pourrait être conduit à la prison de Makala à l’issue de la confrontation.

Mercredi soir, la nouvelle de la mise en détention de Pascal Mukuna a vite fait de reléguer au second plan les ravages de la covid-19 en RDC où la pandémie progresse à grande vitesse depuis une semaine. 72 nouveaux cas positifs de covid-19 ont été confirmés hier, tous de Kinshasa, soit un cumul de 1.242 cas positifs depuis la confirmation du premier cas, le 08 mars 2020. Le pays a enregistré jusque là 157 patients de covid-19 guéris et malheureusement 50 décès. Après Kinshasa avec 1.162 cas, le Kongo central donne des signes d’inquiétudes avec 55 cas positifs en deux semaines.

Malgré ces informations inquiétantes, les Kinois ont plutôt choisi d’ergoter longuement hier dans la rue et dans les réseaux sociaux sur l’arrestation de Pascal Mukuna. Si certains parlent d’une arrestation « politique » pour le faire taire et donc crient au scandale, d’autres estiment que le dirigeant du mouvement « Eveil patriotique » mérite bien ce qui lui arrive. « Ce n’est qu’un aventurier », « c’est un violeur qui doit croupir en prison », « c’est un ingrat.

Après avoir bouffé l’argent de Joseph Kabila, il a craché sur la main qui l’a nourrie », a-t-on entendu hier aux arrêts de bus où les Kinois ne respectent quasiment plus la distanciation sociale pour éviter la contamination au covid-19. Quant au masque ou cache-nez, il est devenu juste un jouet que beaucoup trimbalent en mains tandis que d’autres le laissent pendre sous le menton au lieu de le porter.
Qui le prochain ?
La vie continue donc dans la capitale congolaise où les magistrats volent la vedette au nouveau coronavirus. « Etat de droit » ? Sans doute. « Renouveau de la justice » ? Pourquoi pas.

Le ministère public n’a-t-il pas dit lundi dernier que le procès Kamerhe avait aussi une valeur « pédagogique », se félicitant au passage de l’Etat de droit que veut instaurer le président de la République. On doit s’attendre à beaucoup d’autres interpellations.
Aujourd’hui l’assemblée nationale va sans doute autoriser le procureur général de la République à auditionner John Ntumba, ministre de la formation professionnelle.

Accusé de présumé détournement de fonds dans le cadre du programme de cents jours pour la construction des routes dans la province du Kasaï, John Ntumba, risque d’être placé en détention après son audition dans les prochains jours. Et comme l’exige la constitution, il devra démissionner s’il est mis en accusation (article 166 de la constitution).

Après l’assemblée nationale, ce sera au tour de l’assemblée provinciale de Kinshasa d’examiner la demande d’autorisation des poursuites à l’encontre du député provincial Mike Mukebayi que vient de lui adresser le procureur général près la cour d’appel de Kinshasa/Gombe. Si les députés provinciaux de Kinshasa accèdent à la demande du procureur général, Mike Mukebayi va entamer un autre marathon qui pourrait le reconduire en détention à la prison de Makala, qu’il venait pourtant de quitter il y a quelques jours à peine. Le député élu de Lingwala est accusé par des membres du bureau de l’assemblée provinciale d’imputations dommageables dans l’affaire de construction du bâtiment de cette institution.

Pendant ce temps, un autre procès dans le cadre du programme de cents jours du président de la République devrait s’ouvrir bientôt. A la barre, le directeur général de l’Office des routes, le directeur général de l’Office des voiries et drainage, le directeur général du Fonds national d’entretien routier ainsi que le directeur général de la société Safricas. Le directeur général de l’Ogefrem échappe encore à toutes les tentatives de son interpellation par la justice, malgré invitations, mandat de comparution ou mandat d’amener lancés contre lui.

On doit reconnaître que la justice fonctionne à plein régime. Dans l’opinion on attend voir tous les dossiers « louches » touchant aux deniers publics être examinés et pas que ceux du programme d’urgence du chef de l’Etat. Si les politiques se refusent à fouiner dans le passé, la justice qui est indépendante du pouvoir exécutif, peut s’y risquer.
FMK

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